Résilience des populations

Comment faire face à l’adversité ?

 

Un article de Virginie PERROMAT-MALIKITE. Contributions de Serge TISSERON et Jacques FAYE

  Face à l’emballement actuel des catastrophes naturelles et technologiques, être « Tous résilients face aux risques » devient fondamental. La Résilience nous éclaire sur la faculté organisationnelle humaine de faire face et de nous relever suite à un traumatisme. Au niveau individuel, familial et plus largement social, chacun de nous doit penser sa vulnérabilité et s’interroger sur comment faire preuve de résilience ? Cette question amène plus largement à faire un point sur la Culture du risque, indispensable à la résilience des populations. Sur fond de dérèglement climatique et comme jamais auparavant, le  Gouvernement s’est saisi de l’urgence de la résilience de nos territoires. Le 13 octobre 2022, nous serons tous mobilisés pour la première édition de la Journée nationale « Tous résilients face aux risques ». Les Assises Nationales des Risques Naturels (les 13 et 14 octobre prochains) constitueront également un temps fort d’échanges autour de la prévention. Les acteurs de la gestion des risques y seront réunis autour des sujets d’actualité. L’IFFO-RME y copilote un atelier dédié à la Culture du Risque. Rendez-vous à Strasbourg !

 

1. La définition de la Résilience : une connaissance indispensable à la Culture du Risque

La résilience individuelle et collective au sein d’un processus. Apparu il y a vingt ans en France, le mot « résilience » n’en finit pas de se déployer dans toute sa complexité. Sa définition actuelle va de pair avec une meilleure connaissance de ce processus psychologique de reconstruction. Aujourd’hui, cette faculté de faire face à l’adversité n’est plus considérée comme individuelle. Face au changement climatique, dépasser le traumatisme entre dans une démarche sociétale, comme nous l’explique Serge Tisseron. La Résilience n’est plus sectorielle mais globale. Elle est le reflet d’un jeu d’interfaces d’acteurs au sein d’un système complexe de gestion des risques. Cet été, les feux de forêts en France nous ont montrés combien mobilisation et solidarité humaines composaient cette résilience organisationnelle. Au sein d’un système imbriqué de prévention des risques La capacité de résilience est donc issue des qualités de chacun pour surmonter le stress post-traumatique. Mais, elle est aussi nécessairement développée par des processus complémentaires et favorables de résilience communautaire. La mise en place de Plans Communaux de Sauvegarde Intercommunaux (Loi Matras – 25 novembre 2021) suit cette logique. La politique de prévention des risques majeurs et celle relevant de la gestion de crise sont les composantes normatives et régulatrices nécessaires pour accroître les facteurs de résilience. Aujourd’hui, la place dédiée à l’expérimentation locale suite à des catastrophes reflète également la nécessité d’innover. Le dispositif « Mieux reconstruire après inondations » (MIRAPI) l’atteste, ouvrant le champ des possibles pour un avenir résilient.

 

2. La mémoire des catastrophes ne suffit plus, elle doit devenir Culture du risque                              

L’information et l’éducation aux risques majeurs au cœur de la Résilience. Les récits initiatiques, construits autour de notre mémoire des catastrophes, avaient pour objectif de protéger les hommes des risques naturels. Ces retours d’expériences de cataclysmes, issus de la mémoire traumatique, ne suffisent plus à bâtir une société résiliente. Aussi, depuis près de vingt ans, l’information et l’éducation préventives se sont positionnées comme des relais de la mémoire transgénérationnelle des risques naturels et technologiques. Dans le but de sensibiliser les populations, ce savoir commun favorise les facteurs de résilience. Entre évolution législative et réajustements nécessaires, Jacques Faye (anc. Au Bureau de l’Information Préventive) nous livre son regard sur cette dynamique du Ministère en charge de l’ Écologie.

 

Donner du sens à la Culture du risque 

Connaissance et conscience du risque demeurent donc un savant équilibre à mettre place. Garantes de la résilience sociétale, celles-ci se traduisent par la capacité de l’Homme à anticiper et agir pour se protéger face aux risques majeurs. Elles véhiculent un message fort porté par la Culture du Risque : ne plus craindre sa vulnérabilité et être résilient en puissance.

Selon Serge Tisseron, la « véritable culture » comporte une part de régulation sociale qui imprègne l’ensemble des règles de vie des habitants. Elle se traduit par des réseaux de significations et de symboles dans notre écosystème social : repères de crues et boucliers bleus apposés sur le Patrimoine Culturel bâti vulnérable par exemple. Enfin, l’humain est la clé de voûte d’une résilience intégrale face aux catastrophes. La solidarité, les créations artistiques et les événements collectifs organisés dans nos espaces de vie rendent cette Culture du risque « vivante ». Les commémorations de catastrophes prennent alors tout leur sens préventif, au-delà de l’évènement culturel.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

3. La « véritable » Culture du Risque pour la Résilience des populations

Le gouvernement français appelle à une mobilisation nationale à la hauteur de la vulnérabilité croissante des populations et des territoires. Dans la lignée du plan d’actions gouvernemental « Tous résilients face aux risques », l’ensemble des acteurs de la prévention des risques majeurs sont appelés à redoubler d’initiatives pour acculturer les populations. Pour renforcer la Résilience, l’IFFO-RME a structuré sa dynamique autour des quatre axes suivants :

  • Développer ses actions de prévention dans un cadre événementiel
  • Poursuivre la formation des acteurs de l’éducation préventive
  • Favoriser les liens entre Plan Communal de Sauvegarde (PCS) et Plan Particulier de Mise en Sûreté (PPMS)
  • Valoriser les actions des établissements d’enseignement à travers le Boulier de la Résilience

Dans cette même perspective, l’Association Française de Prévention des Catastrophes Naturelles et Technologiques (AFPCNT) a été désignée par l’Etat pour promouvoir la Culture de Résilience. Son action vise à renforcer la montée en compétences des acteurs territoriaux de la gestion des risques majeurs. Elle apporte également un soutien aux démarches de prévention. Pour œuvrer collectivement à la résilience des territoires, l’AFPCNT coconstruit le projet Skarabée avec ses membres et ses partenaires, dont l’IFFO-RME fait partie. Parmi les objectifs de ce projet figurent une mobilisation de grande ampleur lors de la journée nationale du 13 octobre et la réussite des Assises Nationales des Risques Naturels.

 

Partout en France continentale et en Outremer, nous sommes invités à agir, nous mobiliser et devenir plus que jamais militants de la Culture du Risque. Les opportunités sont nombreuses pour 2022 : Journée Nationale « Tous résilients face aux risques » du 13 octobre, Assises Nationales des Risques Naturels etc. . Elles constituent la pierre d’angle d’une dynamique de prévention déjà bien ancrée et associant en continu de nombreux réseaux d’acteurs dans nos territoires. Ces mobilisations nationales  sont également inspirantes pour diversifier nos actions tout au long de l’année et enrichir notre agora des bonnes pratiques résilientes. Formatrices, formateurs, vous êtes invités à  nous faire part de vos initiatives pour l’éducation préventive réalisées le 13 octobre prochain !  

Virginie PERROMAT MALIKITE

Formatrice Risques Majeurs éducation

Consultante risques majeurs

 

De la résilience individuelle à la résilience des populations, des risques majeurs au dérèglement climatique
Par Serge Tisseron, président fondateur de l’Institut pour l’Histoire et la Mémoire des Catastrophes (IHMéC) Nous sommes passés en vingt ans de l’idéalisation de la résilience individuelle à une conception multifactorielle des résiliences. La société est un système constitué d’éléments imbriqués, des plus petits aux plus gros : les individus, les familles, les régions, les pays, jusqu’à la planète entière. Chaque renforcement de la résilience d’un élément du système renforce sa résilience globale. Les trois définitions successives du mot qui ont longtemps été opposées sont ainsi devenues complémentaires : les qualités de résilience de chacun, les divers processus possibles de résilience, et la force de Résilience partagée par l’ensemble du monde vivant. Le réchauffement climatique a confirmé l’importance de cette synergie. En revanche, il modifie en profondeur le paysage de la prévention. En 2008, lorsque l’IHMEC a été fondé, la mémoire des catastrophes passées s’imposait comme un repère fort pour inciter à la vigilance. D’où l’importance du recueil des mémoires individuelles et collectives, de la mise en place de commémorations locales et de témoins silencieux, comme les repères de crue, et de l’affichage dans chaque mairie de la liste des catastrophes survenues sur leur territoire avec possibilité d’accès en ligne. Mais le réchauffement climatique bouleverse l’écosystème si rapidement que cela ne suffit plus. La mémoire n’est plus un outil suffisant. Nous devons maintenant tirer au jour le jour la leçon des changements inédits qui nous frappent, ou dont d’autres sont frappés. C’est la vigilance et la conscience citoyenne de chacun qui est au service de la résilience de tous, bien autant que la mémoire. En même temps, le dérèglement climatique montre les limites d’une définition de la résilience centrée sur les événements exceptionnels. Il oblige à prendre en compte l’importance des stress chroniques, et à faire de la lutte contre les inégalités un enjeu majeur de la résilience. Afin de donner une vie meilleure à tous les citoyens, y compris les plus défavorisés et les plus vulnérables, dans les moments habituels comme dans les épreuves hors normes.

 

13 octobre, journée internationale pour la réduction des risques de catastrophes
Par, Jacques Faye, Responsable du Bureau de l’Information Préventive DPPRDGPR de 1997/2018 Il semble cette année que le Gouvernement veuille relayer avec plus d’éclat cette journée mise en place par les Nations Unies depuis plus de 25 ans. En effet, en 1998, je découvrais que le deuxième mercredi du mois d’octobre était consacré à la réduction des risques de catastrophes naturelles avec dans de nombreux pays, des actions significatives principalement dans les domaines de l’éducation et de la préparation. Cependant, avec l’obligation d’information préventive, les formations d’enseignants, la mobilisation des bénévoles de protection civile et la couverture assurantielle obligatoire, la France n’avait pas à culpabiliser. Depuis, chaque année, la DPPR devenue DGPR, notre Ministre, quel qu’il soit, les services déconcentrés se sont mobilisés auprès des associations comme l’IFFO-RME pour proposer des animations. Leur succès a été à la hauteur de l’implication des élus locaux. Or, ceux-ci se sont montrés très souvent réticents à la prévention des risques majeurs qui coûte et empêche leurs projets. Face à cette situation, nous avons contournés cette attitude par d’autres outils relevant directement de la Préfecture comme l’Information Acquéreur Locataire, la pose des repères de crues, le financement des PAPI, les animations Plouf, etc. En fait, il existe un indicateur simple de cette journée : le respect de l’article L125-1 et des articles R125-12, 13 et 14 qui obligent le maire à afficher les risques naturels et technologiques connus sur sa commune et mentionnés dans le dossier départemental des risques majeurs. Aujourd’hui, les risques sont devenus réalité : inondation, canicule, tsunami, pandémie, mégafeux, sécheresse aggravée, etc. dans un contexte de déplacements des populations liées à la misère économique, la famine et la guerre. Alors, il n’est jamais trop tard pour bien faire… pour la planète qui en a vu d’autres, mais tout simplement pour notre survie et le futur des générations à venir.

 

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